Avec 23 ONGs de protection de l’environnement et de lutte contre les inégalités, l’association all4trees interpelle, ce mercredi 17 juillet, le Premier ministre sur l’utilisation de l’huile de palme dans les carburants, pour qu’il ne cède pas au lobbying mené par Total pour changer la loi.
Dans 6 mois, l’huile de palme doit être exclue de la liste des biocarburants. Mais plutôt que de revoir son projet, Total s’est mis en tête de changer la loi. En septembre 2019, le Parlement examinera le projet de loi de finances 2020 : 24 associations et ONGs écrivent au Premier Ministre pour lui demander de respecter le vote des députés et de placer Total face à ces responsabilités. Ce n’est pas la loi qu’il faut modifier, c’est le projet de bio raffinerie de La Mède qu’il faut revoir !
A l’attention d’Édouard Philippe, Premier Ministre
Paris, le 17 juillet 2019
Objet : maintien de l’exclusion des produits à base d’huile de palme de la liste des biocarburants au 1er janvier 2020
Monsieur le Premier ministre,
Le 18 décembre 2018, dans le cadre l’examen du projet de loi de finances (PLF), l’Assemblée Nationale a voté l’exclusion des produits à base d’huile de palme de la liste des « biocarburants » à partir du 1er janvier 2020.
Comme vous le savez, l’extension des plantations de palmiers à huile en Asie du Sud-Est est une cause majeure de déforestation et donc d’émissions de gaz à effet de serre. Depuis une dizaine d’années, une quantité croissante d’huile de palme est utilisée dans les carburants.
L’autorisation de fonctionnement que vous avez délivrée à Total pour sa bioraffinerie de La Mède a suscité une forte controverse et une opposition de multiples acteurs. Elle est devenue un symbole car à elle seule, cette bioraffinerie pourrait importer jusqu’à 550 000 tonnes de produits à base d’huile de palme alors que le gouvernement s’était engagé lors de la présentation du Plan Climat, en juillet 2017, à fermer une fenêtre d’opportunité permettant l’incorporation d’huile de palme dans les carburants.
Alors que les députés ont accordé un délai d’un an à Total pour revoir son projet et éviter ainsi une fermeture brutale du site, le PDG, M. Patrick Pouyanné, a fait le choix de l’entêtement et a déclaré publiquement qu’il mettrait tout en œuvre pour modifier cette loi en prétendant avoir l’appui du gouvernement. À ce jour, cette affirmation n’a pas été démentie par le gouvernement.
Contrairement à ce qu’affirme Total, l’exclusion des produits à base d’huile de palme de la liste des biocarburants n’est pas discriminatoire mais s’appuie sur la prise en compte de critères environnementaux établis : les études les plus récentes montrent que l’huile de palme est le biocarburant présentant le plus mauvais bilan carbone aujourd’hui sur le marché. Le Conseil constitutionnel, saisi à l’issu de l’adoption du projet de loi de finances 2019, n’a pas jugé utile de remettre en cause la décision des députés.
Enfin, cette décision respecte le droit européen puisque la Commission européenne a reconnu dans un acte délégué que les carburants produits à partir de cultures oléagineuses, au premier rang desquelles l’huile de palme, présentaient un risque élevé de changements d’affectation des sols indirects leur utilisation n’étant à ce titre pas soutenable. De plus, la directive européenne REDII permet aux États membres de fixer un plafond d’incorporation plus bas pour les agrocarburants de première génération, et différencié selon les matières premières, en prenant en compte les changements d’affectation des sols indirects.
Vous avez réaffirmé, dans votre discours de politique générale, votre souhait d’accélérer la transition écologique. Nos associations, et les citoyens, attendent désormais des actes. Nous serons vigilants, et mobilisés dans les prochains mois, pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de recul vis à vis d’une loi déjà adoptée et qui a supprimé une niche fiscale néfaste pour le climat.
Au contraire, nous vous invitons à être plus ambitieux et à engager une sortie accélérée de l’ensemble des agrocarburants cultivés sur des terres dédiées, alors que la programmation actuelle (PPE, NECP) prolonge l’atteinte du plafond maximal de 7% fixé par la Commission européenne jusqu’en 2028. L’huile de soja constitue ainsi, après l’huile de palme, la matière première présentant le risque le plus élevé d’induire des changements d’affectation des sols indirects.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions, Monsieur le Premier ministre, de bien vouloir recevoir nos salutations les plus respectueuses.
- Pour Action Aid, Antoine Bouhey, Directeur
- Pour Agir pour l’Environnement, Mathias Chaplain, Coordinateur des campagnes
- Pour Alofa Tuvalu, Gilliane Le Gallic, Présidente
- Pour all4trees, Jonathan Guyot, Président
- Pour Alternatiba, Lea Vavasseur, Porte-parole
- Pour ANV COP21, Fanny Delahalle, Porte-parole
- Pour les Amis de la Terre, Khaled Gaiji, Président
- Pour Bloom, Sabine Rosset, Directrice
- Pour Canopée, Sylvain Angerand, Coordinateur des campagnes
- Pour le CCFD – Terre Solidaire, Sylvie Bukhari de Pontual, Présidente
- Pour le CLER, Jean-Baptiste Lebrun, Directeur
- Pour Cœur de Forêt, Margaux Sabourin, Présidente
- Pour Envol Vert, Daisy Tarrier, Directrice
- Pour Fern, Hannah Mowat, Coordinatrice des campagnes
- Pour France Nature Environnement, Michel Dubromel, Président
- Pour Greenpeace, Jean-François Julliard, Directeur
- Pour la LPO, Allain Bougrain Dubourg, Président
- Pour Nature Rights, Samanta Novella, Présidente
- Pour Notre Affaire à Tous, Marie Pochon, Coordinatrice Générale
- Pour le Secours Catholique-Caritas France, Bernard Thibaud, Secrétaire Général
- Pour le Réseau Action Climat, Morgane Créach, Directrice
- Pour One Voice, Muriel Arnal, Présidente
- Pour Oxfam France, Cécile Duflot, Directrice Générale